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Compass : le Wild West à la cantine !

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Dans les restaurants du groupe Compass, il faudra bientôt faire déposer les pistolets comme à l’entrée du « Saloon » !
Melé à l’un des plus gros scandales planétaires (ESS et les Nations Unies), Compass cite Enron et WorldCom pour justifier la mise en place d’une « hotline éthique » de dénonciation des « pratiques condamnables » au sein de ses entreprises. Appelé « Speak Up », le programme reprend à son compte la commande des instituteurs des classes de primaire anglo-saxonnes quand un enfant ne parle pas assez fort.
De quoi s’agit-il ? La loi Sarbanes-Oxley oblige toute société déposant ses comptes aux Etats-Unis de se conformer à un certain nombre de règles. Adoptées maintenant dans de nombreux pays suite aux normes de Responsabilité Sociétale des Entreprise et celles de l’IFRS (nouvelles normes internationales comptables), la France fait figure d’exception. La dénonciation anonyme réveille encore de douloureux souvenirs.
Alors pourquoi faut-il que les multinationales souhaitant se conformer à cette loi se voient obligées de bâtir des systèmes de délation organisée confinées aux frontières de notre pays ?
Aux Etats-Unis, c’est devenu un big business. Compass propose de confier (dans un effort de transparence accrue) la gestion de ce dispositif à une autre multinationale domiciliée à Charlotte en Caroline du Nord tout comme Compass Group USA. Il s’agit de Global Compliance Services, anciennement Pinkerton Compliance Services, une filiale de la célèbre agence de détectives privés rachetée par son management. Toutes les dispositions (nature et contenu des rapports, délais d’archivage
) seront scellées par contrat avec cette société.
La CNIL a émis des recommandations mais comme elle ne reçoit une simple déclaration, n’a aucun moyen de contrarier les intentions des entreprises.
Ainsi Compass met en œuvre un système anonyme aux USA, en Grande Bretagne et ailleurs, mais préfère des dénonciations identifiées mais confidentielles en France. Pourquoi serait-il plus difficile en France « de donner suite à une alerte si l’on ne peut obtenir d’informations complémentaires de son auteur » ? La confidentialité est garantie tant que son intervention est jugée de « bonne foi ». Par qui ?
Ailleurs, le système est limité aux domaines financiers et comptables. Ces domaines relèvent du Comité d’audit, l’équivalent de nos Commissaires aux Comptes, et en tout cas proche de la direction financière. Ici, le programme serait confié à la Direction des Ressources Humaines. Là aussi, on s’éloigne de la résolution du problème pour la sanction de « ceux par qui le scandale arrive ».
En France, le champ de la dénonciation est élargi à de nombreux domaines qui peuvent être interprétés par les salariés comme autant de possibilités de dénoncer leur hiérarchie. Une occasion de se venger peut alors se transformer en entretien préalable au licenciement pour celui qui est dénoncé comme pour le dénonciateur.
Malgré les égards de Compass pour faire croire le contraire, on en conclut que ce soit le seul but de ce programme. D’autant plus que sur le site internet dédié à cet objectif, on peut balancer ses collègues dès maintenant, anonymement, et en français, et ce dans de nombreux domaines qui ne sont pas mentionnés dans le descriptif publié par la direction (discrimination, harcèlement, menaces, vol, alcoolisme, non respect du règlement intérieur
).
P.J. Captures d’écran réalisées ce jour.